Un heureux événement

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Désormais ma vie ne m’appartenait plus. Je n’étais plus qu’un creux, un vide, un néant. Désormais, j’étais mère. E.A.

Violent, sincère, impudique, le nouveau roman d’Eliette Abécassis brise les tabous sur la maternité, cet «heureux événement» qui n’est finalement peut-être qu’une idéologie fabriquée de toutes pièces. Après Mon père et Clandestin, la romancière affirme un ton toujours plus personnel, où la fiction se mêle à une analyse subversive de la société.

Normalienne et agrégée de philosophie, Éliette Abécassis alterne romans intimistes (La Répudiée, Mon père, Un heureux événement), thrillers (Qumran, Le Trésor du Temple), sagas (Sépharade) et essais (Petite métaphysique du meurtre, Le Livre des Passeurs, Le Corset invisible).

Voici l’histoire ordinaire d’un couple ordinaire qui va avoir son premier enfant! « on ne nait pas mère, on le devient »! C’est un livre coup-de-poing osant affronter le sacro-saint mythe du bonheur de la maternité qui nie le cataclysme vécu quelquefois jusqu’à briser des vies. Fatigue chronique aux multiples tentacules… Pourtant, au-delà de ce raz-de-marée qui paraît infranchissable, que d’amour de cette jeune maman pour sa petite, toute petite fille ! Trop fusionnel, peut-être. Le rapport de Barbara avec sa grossesse est très particulier!… cela plaît, ou pas! Des mots parfois très durs, une grossesse pas tout à fait comme on l’imagine… Une grossesse qui a marqué la rentrée littéraire 2005.

« Tout était allé si vite. Le bébé, le déménagement, le changement de travail… Pendant que la petite dormait, je défis mes cartons où il y avait toute ma vie. D’anciennes photos de vacances, d’anciennes lettres d’amoureux oubliés, des mots tendres. On vit sans s’en rendre compte et un beau jour, on vieillit. Les photos s’accumulent dans les cartons, avec les cartes postales et les billets d’avion utilisés. Et le temps qui avance, réduisant tout à néant, surplombant les êtres et les choses, superbe, impressionnant, le temps comme le véritable Dieu de l’homme, qui le crée et le réduit en poussière. »

Il était temps qu’on arrête de nous vendre l’arrivée d’un bébé comme LE moment idyllique de notre vie, dégoulinant de bonheur! Un thème qui touche… que l’on soit parent, ou pas!
Mes 32 ans, mon horloge biologique et moi, on a aimé!… Forcément: c’est un peu LE sujet! Pas un scoop!
Bien sûr, notre « expérience » en matière de grossesse se résume encore – encore! – aux récits des copines, qui évoquent – avec des larmes dans les yeux, et un sourire incandescent, le « plus beau jour de leur vie »!… Elles ne tarissent pas d’adjectifs – toujours superlatifs – sur la beauté de ce qu’elles vivent: Extraordinaire, Incroyable, Prodigieux, Inoui, Phénoménal, Vertigineux, Irréel!… Elles y mettent même des majuscules! Elles sont dithyrambiques sur tout ce qui a trait à cette fabuleuse révolution de leur vie! Parfois – rarement, mais parfois – on nous évoquera un vague début de babyblues qui « n’a duré que quelques jours, rassure-toi! »… Voilà nos amies happées par l’ « instinct maternel » qui traverse les générations sans prendre une ride, ces préoccupations que mes talons et moi trouvons assez peu préoccupantes du genre « mac laren? bébé confort? »… « berceau ou minicuna? »…  – et pour cause  (Bah oui, évidemment, en soirée salsa, il y a plus pratique que la 3 roues tout-terrain de chez Chicco, 12.38 kg avec sa capote, freinage progressif, même si c’est le 2.0 de la poussette!) – L’une ou l’autre avouera – rarement – être « impatiente de reprendre le travail… parce que Pampers, blédina et Guigoz 1er âge, ça ramollit! »
Bon … Soyons honnêtes: mes connaissances en  matière de maternité ne sont donc pas encyclopédiques!!!
Alors forcément, à 32 ans, on idéalise, hein! On a vite fait de se laisser attendrir, hein! Forcément, à 32 ans, on se précipite sur ses neveux et nièces, les enfants des copines, les derniers nouveaux-nés en date, bref, tout ce qui s’approche de près ou de loin d’un bébé, hein! On se targue d’avoir reçu « un record de faire-parts de naissances en 2013! » … on s’attendrit… on va même jusqu’à admirer ces sérialmothers qui gèrent avec brio: couple, bébés – au pluriel – , sexe, boulot, style, frigo et petits plats, petits pots maisons (et vive le babycook)!…
On glisse un inoffensif « Au fait, chéri, Laura (TM) vient d’accoucher!… et attends, tu ne vas pas me croire, Aude (TM) attend le second » … Inoffensif, vraiment? – Bon. OK. Sujet plus touchy, tu ne trouves pas. Autant chercher la Tour Eiffel à Shangai!
Alors « un heureux événement« , forcément, ça remet en place! ça te descend vite fait bien fait de ton  baby-mood-nuage, avec un petit effet boulet de canon (sortez les parachutes!)… ça pimente les récits des copines d’un peu de réalité!
Alors là, tout de suite, on sait!… Pas besoin de nous réexpliquer! Mes 32 ans et moi, on a compris que notre horloge biologique peut encore attendre… et que finalement, on n’est plus du tout si pressée!… Qu’on se le dise, cela ne nous empêche pas de craquer sur des petites robes-bloomer adorables au rayon bout’chou de chez monop!…
Merci Eliette Abécassis pour cette tranche de réalité!

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